Commencez une dépression : Six erreurs à éviter si vous
L’entrée dans la dépression se fait souvent de façon sournoise, avec par exemple une forte impression de fatigue ou de ralentissement, et quelques idées noires. Mais qui n’en a pas ?
Aussi, avec tout ce stress au bureau, ce client qui exige un engagement à 100% sur son projet de trottinette jetable, les voisins qui fond du boucan tous les soirs, le petit dernier qui a encore jeté un camembert à la figure du directeur d’école, etc.
Au début on pense avoir besoin de vacances.Et puis au retour des vacances, on commence à s’interroger : et si…Or, la dépression a tendance à s’entretenir elle-même par plusieurs cercles vicieux. Quand ils s’enclenchent et se stabilisent dans le temps, il devient beaucoup plus difficile de lutter d’où l’intérêt de les repérer et de les bloquer au plus tôt.
Dans cet article je vous présente six erreurs fréquentes ayant pour effet d’entretenir une dépression débutante et vous montre comment les éviter.
Erreur n°1 : Enclencher le cercle de l’isolement social
C’est, selon moi, le plus puissant et le plus ennuyeux. La mauvaise qualité du cercle social est en effet un important facteur de risque de développer une dépression majeure.
Voici une petite illustration pour vous expliquer très simplement comment cela fonctionne.
Dans un premier temps, la survenance d’un petit coup de mou entraîne la fatigue qui nous fait ressentir la présence des autres comme plus difficile. On a la flemme de voir ses amis, pas envie de parler de tous ces problèmes qui nous trottent dans la tête, on préfère rester seul avec soi-même et donc on évite de plus en plus les autres, un peu comme dans la chanson de Bénabar.
Malheureusement, l’homme est un être fondamentalement social et ce qui semblait être une bonne idée se retourne contre nous assez vite puisque l’isolement social accroît la déprime et l’altération de la qualité de vie.
Dans un second temps, les autres commencent à nous éviter. Comment cela se produit-il ?
D’abord, nous les évitons nous-mêmes! Eh oui, c’est un peu tarte, mais quand on se met aux abonnés absents on est de moins en moins invité à dîner chez des amis. Et pour cause ! On fait faux bond une fois, deux fois, et finalement on ne nous rappelle plus.
Ensuite, les autres nous évitent parce que notre contact les déprime. C’est ce que les spécialistes appellent la “perte des habilités sociales” ; formule signifiant que l’on devient tout bonnement gonflant. On a tendance à afficher une mine triste, on parle peu, quand on parle c’est souvent pour se plaindre ou pire se dévaloriser.
Par conséquent, de moins en moins de monde a envie de nous voir.Les autres nous rejettent, ce qui entraîne donc la déprime comme dans le cas de l’isolement social.Sauf qu’ici, l’origine est un rejet provenant d’autrui et non de nous-même.En cela la dépression est l’épreuve du feu d’un cercle social.
Ainsi, par un double mécanisme la dépression conduit à un isolement social de plus en plus grand aggravant de ce fait même ses propres effets lesquels augmentent l’isolement social.
Il est donc capital de ne pas enclencher ce cercle vicieux aux effets dévastateurs.
Lien et numéros utiles pour les personnes en dépression : info-depression.fr
Comment agir ?
Il existe des astuces pour éviter d’enclencher le cercle de l’isolement social.
En premier lieu, il faudrait privilégier la qualité à la quantité de vos relations sociales. Il est important de conserver dans son entourage des rapports fréquents avec des personnes bien choisies qui sauront comprendre votre situation et éprouver de la compassion. En effet, la dépression rend très sensible à la tonalité des échanges. S’ils se passent mal, cela altère sensiblement le bien-être mais s’ils se passent bien, cela l’améliore considérablement.
En deuxième lieu, il vous faudra impérativement soigner vos habilités sociales. Ok, vous n’êtes pas dans une forme olympique. Mais, si vous ne parlez que de ça, cela va finir par casser les pieds de tout le monde. Maintenez des intérêts pour d’autres choses pour ne pas toujours ramener la conversation à vous et à vos problèmes.
L’actualité est un merveilleux sujet bateau utilisable sans modération pour enchaîner des conversations socialement satisfaisantes. Évoquez vos souffrances en termes précis et non généraux. Il y a une énorme différence entre dire “hier j’étais vraiment fatigué alors j’ai préféré ne pas sortir” et “hier j’étais hyper mal”. La seconde formulation gonfle artificiellement votre sentiment négatif. Si vous parlez de vous, parlez plutôt de ce que vous ressentez et ne vous plaignez pas trop.
On évoque plus facilement la compassion en disant “quand j’ai entendu mon patron, je me suis senti vraiment blessé” que “mon patron est un vrai connard”. En plus, cela vous évite de peindre votre environnement quotidien comme étant une somme de problèmes incontrôlables vous tombant sempiternellement sur le dos.
En troisième lieu, il n’est pas question pour vous de vous dévaloriser ou de vous présenter comme dépressif. C’est terriblement destructeur de votre estime de vous-même et de la qualité de la relation à autrui. Imaginez : si quelqu’un passe son temps à vous dire “je ne suis qu’un nul”, sauterez-vous de joie la prochaine fois que vous verrez son nom s’afficher sur votre téléphone ?
Ne prenez pas tout pour vous. En effet, si l’échange avec autrui est ambigu, le dépressif tend à le considérer de facto négatif et à croire que c’est sa faute et agit ensuite selon cette idée fausse.
On rejette ainsi son collègue de bureau qui vous fait vous sentir si nul alors qu’en fait il vous a répondu un peu vite car il est débordé de travail.
Erreur n°2 : Enclencher le cercle de l’absence de plaisir
La difficulté ou incapacité à ressentir des émotions positives a un joli nom en psychiatrie, on appelle ça « l’anhédonie ».
Quand la vie ne procure plus aucun plaisir, comment voulez-vous y éprouver le moindre intérêt ? Tout devient une succession de corvées sans fin, et on finit par ne plus avoir envie de faire quoi que ce soit, y compris ce qui aurait pu provoquer du plaisir. Donc, la dépression incite à réduire le nombre d’activités agréables, ce qui renforce davantage la dépression, et qui incite encore à réduire le nombre d’activités plaisantes.
Le cercle vicieux se situe précisément à cet endroit-là. Heureusement, rompre ce cercle vicieux est plus facile que le précédent. En effet, on ne contrôle pas totalement une situation sociale mais par contre vous pouvez toujours choisir de faire une activité plaisante.
Comment agir ?
Pour se sortir du cercle de l’absence de plaisir, ne restreignez pas vos activités plaisantes.Il faut absolument augmenter la sensation de contrôle de vous avez quant au plaisir que vous pouvez éprouver Ainsi, lancez-vous dans des activités que vous aurez préalablement sélectionné avec soin.
Ces activités doivent être facilement accessibles. Il n’est pas nécessaire de les envisager trop prenantes en énergie ni de trouver quelque chose de trop compliqué. Même traverser le parc à côté de chez vous en revenant du bureau est bon à prendre.
Tout ce qui compte est de le faire pour goûter au plaisir que vous pouvez ressentir. Si cela vous aide, évaluez la fatigue et le plaisir de l’activité de manière anticipée, puis après l’activité, observez la différence.
Erreur n°3 : Ruminer son passé de manière stérile
Il est très frappant de constater à quel point le dépressif est souvent englué dans une recherche des causes de son mal-être, situées dans le passé. Ce regard vers hier plutôt que vers demain est d’ailleurs ce qui le distingue le mieux d’une personne souffrant plutôt d’anxiété.
Qu’est-ce qui provoque cette tendance à la rumination passéiste ? Tout d’abord il y a le présupposé, largement influencé par la représentation commune de la psychothérapie, que la cause est un événement dans le passé, voire dans le passé lointain. On peut aussi adjoindre l’idée issue de la psychanalyse freudienne, que retrouver la cause perdue fait cesser le symptôme. Donc chercher la cause procède en premier lieu d’une démarche auto-thérapeutique parfaitement respectable dans son objet.
Mais cela amène à deux conséquences fâcheuses : Tant que l’on n’a pas trouvé la “cause qui débloque les choses”, rien ne bouge jamais On n’agit pas véritablement sur ce qui entretient la dépression dans le présent.
Or, si tant est que l’on puisse un jour identifier effectivement une cause passée et unique (rien n’est moins sûr), la dépression a eu tout son temps pour détruire allègrement votre vie.
Quel intérêt de pouvoir se dire que l’on n’est plus dépressif quand suite à des années de déprime à la recherche de la cause, on a perdu son conjoint, ses enfants, son travail, ses amis, son logement et parfois bien plus encore ?
Une autre raison qui entraîne des ruminations centrées sur le passé, est un attachement affectif à celui-ci, précisément parce que l’on a souffert. Quand on déprime, on est très avide que les gens reconnaissent cette souffrance qui est la nôtre et que toutes les personnes autour de nous éprouvent de la compassion pour notre enfance malheureuse, le décès de notre parent, la maladie, les épreuves, la trahison, les pleurs, l’isolement, la douleur.
Bref, que l’on nous dise : “ben oui, mon pauvre, tu as vraiment énormément souffert dans ta vie, pourtant tu es une personne bien, c’est vraiment trop injuste”. C’est le célèbre syndrome Calimero.
Et c’est vrai que c’est injuste, incontestablement ! Par contre, ruminer le passé ne servira pas vos intérêts. Cela repousse les autres (qui ont déjà assez avec leurs propres problèmes) et cela vous centre sur le passé alors que celui-ci est par nature impossible à modifier.
Comment agir ?
Pour éviter de ruminer ostensiblement son passé, voici quelques astuces :
- Si vous voulez chercher une cause, cherchez ce qui au quotidien entretient la dépression pour agir dessus. Toutes mes félicitations, c’est précisément ce que vous êtes en train de faire en lisant ces lignes. Ne surestimez pas l’intérêt de votre passé, empli de malheurs, pour autrui.
- Si le besoin de conter votre passé est très ancré en vous, allez plutôt voir un professionnel. Ne croyez pas que votre passé détermine votre avenir. Cette croyance vous incite à agir dans ce sens.
- Si vous avez souvent été mal à l’aise en société, cela ne signifie absolument pas que cela sera toujours le cas. Plus vous pensez “je serai toujours mal à l’aise en société”, moins vous aurez tendance à faire d’efforts pour vous sentir à l’aise. Et par conséquent, vous resterez sur une impression que c’est “toujours comme ça”. Ce n’est donc pas, en réalité, votre passé qui détermine votre avenir, mais la croyance que vous avez de ce passé qui détermine votre avenir.
- Mettez vos croyances limitatives à l’épreuve. Vous pensez que ce sera toujours comme ça ? Agissez comme si ce n’était pas le cas, et voyez ce qu’il se passe.
Erreur n°4 : Refuser de consulter son médecin traitant
Grand classique de la dépression et erreur connue, comme le loup blanc, par les professionnels, des croyances telles que :
- déprimer c’est être faible ;
- on n’en sort jamais ;
- si on commence à prendre des antidépresseurs on devient un vrai légume ;
- on ne parviendra jamais à s’arrêter ;
- il y a d’affreux effets secondaires,
- etc.
entravent la démarche anodine du rendez-vous avec le médecin traitant, laquelle est pourtant fondamentale pour une bonne prise en charge.
Ainsi, alors qu’une femme sur cinq et un homme sur dix risque de faire une dépression au cours de sa vie, près d’un tiers des patients ne sont pas pris en charge.
N’oubliez pas : votre médecin voit beaucoup de personnes déprimées. Il voit même beaucoup de personnes déprimées qui l’ignorent et beaucoup de personnes non déprimées mais qui croient l’être.
En outre, ce n’est pas parce que vous consultez pour un coup de déprime que vous ressortirez avec une ordonnance d’antidépresseurs. Et si c’est le cas, posez des questions à votre médecin, quitte à les préparer à l’avance.
Les antidépresseurs sont très souvent diabolisés, à tort ou à raison. Il apparaît de ce fait important d’avoir des informations fiables à ce sujet.
Enfin votre médecin pourra, le cas échéant, vous orienter vers une prise en charge psychothérapique bien adaptée à votre situation.
Comment agir ?
Pour inverser les effets de la déprime : N’hésitez pas à consulter. Ce faisant, vous mettez toutes les chances de votre côté et cela ne vous engage à rien.
Pour toute question, diagnostique, ou traitements médicamenteux, évitez les forums de type doctissimo.
Erreur n°5 : Négliger son hygiène de vie
Il est assez illusoire qu’une bonne hygiène de vie permette à elle seule de sortir d’une dépression. Mais à l’inverse, une mauvaise hygiène de vie rend clairement les choses plus difficiles en accentuant l’impression de fatigue et de ralentissement.
Il n’est pas facile en effet pour une personne sédentaire ayant fait un repas lourd la veille et ayant un penchant pour la bouteille de se réveiller le matin frais et plein d’entrain.
Vous allez me dire que l’on peut très bien se réveiller un peu lourd sans être déprimé pour autant. Et c’est très vrai. Seulement quand on vit depuis un certain temps avec une petite déprime, on a vite tendance à associer ce type d’expérience corporelle à un moral dans les chaussettes.
Même quand ce n’est pas justifié par un sentiment réel d’être déprimé, sentir son corps “comme quand on est déprimé” fait naître cette impression de façon automatique. Ainsi on ne se réveille plus “fatigué” mais “déprimé”.
En conséquence, il est important de limiter de nombre de situations où on ressent son corps “comme déprimé” et d’augmenter celles où l’on ressent au contraire son corps comme “non déprimé et plein d’entrain”.
Ces deux approches passent par une attention particulière accordée à son hygiène de vie.
Comment agir ?
Nous vous procurons quelques conseils qui vous aideront à reprendre du poil de la bête et aller de l’avant.
- Si vous avez tendance à consommer de grandes quantités d’alcool, consultez un spécialiste pour vous aider à limiter votre consommation.
- Mangez équilibré. Mais ne vous imposez pas de régime drastique.
- Sachez apprécier le plaisir de la nourriture en la consommant plus lentement.
- Ne négligez pas le sport, ou de simples promenades, en privilégiant les situations sociales.
Erreur n°6 : Etre intraitable avec soi-même
Etre envahi de pensées dévalorisantes et décourageantes fait partie de l’expérience de la dépression.
- “Je suis nul”,
- “je n’y arrive jamais”,
- “je manque de volonté”,
- “je suis faible”,
- etc.
surviennent à longueur de temps et entretiennent le sentiment dépressif.
Il est donc important de lutter contre la dépression avec des armes qui ne vous reviennent pas en pleine figure.
S’il est normal de vouloir se débarrasser au plus vite de ce sentiment très désagréable, avoir des attentes exagérées joue le jeu de la pathologie. Lutter contre une dépression prend du temps et cela doit se faire calmement. D’autant plus que, les rechutes sont très fréquentes. Il est donc important de procéder sur des bases solides et de se doter d’outils thérapeutiques fiables tant sur le court terme que le long terme.
Etre impatient, ou se dévaloriser parce que les résultats obtenus ne sont pas conformes à ses attentes est totalement contre-productif. La dépression est une maladie et en sortir n’est pas seulement une question de volonté.
Comment agir ?
Pour éviter d’entretenir des pensées négatives :
- Accordez-vous le temps. Quand on reprend la main face à la déprime, beaucoup de cercles vertueux se mettent progressivement en place. faites ce que vous avez à faire, et pour le reste, faites-vous confiance.
- Prenez soin de vous. La dépression provoque parfois une culpabilité agressive qui incite à être très rude avec soi-même.N’ayez pas l’impression d’être votre propre ennemi dans cette épreuve. Votre situation est déjà assez difficile sans en plus en rajouter de manière non justifiée.
- Ne limitez pas votre vie à la lutte contre la dépression. Certes, cette déprime est une pièce envahissante de votre quotidien, mais ce n’est pas la seule. Sachez la garder à sa place sans qu’elle ne soit présente dans tous vos faits et gestes ou objectifs.